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Entretien avec le psychologue du changement Herman Konings

9 septembre 2021

Dans son nouveau livre intitulé ‘Gap the mind’, Herman Konings examine comment les crises accélèrent les processus de civilisation. Ce sera également le thème de son séminaire le jeudi 21 octobre à ARCHITECT@WORK à Courtrai.

 

Traduction d'un article par Jan Hoffman

 

"La pandémie a boosté les processus de civilisation"


Ces derniers mois, il faut avoir vécu sur une autre planète pour ne pas savoir qu’Herman Konings a publié un nouveau livre: ‘Gap the mind’, le septième ouvrage écrit de sa main. Nombre d'entre vous ont déjà assisté à un ou plusieurs séminaires d’Herman Konings et ne seront pas surpris d'apprendre que l'analyste des tendances et psychologue du changement anversois interprète une fois de plus dans celui-ci les tendances de notre société et du marché à sa propre manière.

 

Celui qui a déjà assisté à une présentation de ‘Gap the mind’ connaît déjà le thème central. À savoir – vous attendiez-vous à autre chose? – l'impact d'une crise sur l'esprit humain et, par extension, sur le marché et la société. La pandémie, qui fait toujours rage, a profondément affecté nos vies et accéléré des processus de civilisation latents. Au cours de son séminaire, Herman Konings, titulaire d'une maîtrise en psychologie théorique (KU Leuven) et directeur de l'agence anversoise de recherche sur les tendances et l'avenir Pocket Marketing/nXt, évoquera ce qui nous attend, mais en se concentrant spécifiquement sur le monde des architectes (d'intérieur).

 

Qu'est-ce qui se profile à l'horizon pour notre profession? La nouvelle normalité s'amorce-t-elle dans le monde de la construction et de l'aménagement intérieur, allons-nous bientôt revenir à ce qui nous était familier, ou faut-il s’attendre à une situation intermédiaire?


"Je ne sais pour l’instant pas encore de façon détaillée quels exemples je vais aborder dans le domaine de l'habitat résidentiel et de l'habitat dans la sphère des projets. Et ce pour une simple raison: toutes mes présentations sont préparées sur mesure, ce que je ne fais qu'environ une semaine avant de m'adresser à un public cible spécifique. Je procède délibérément de la sorte car cela me permet d’utiliser au maximum les informations disponibles à ce moment-là."

 

"Mais je peux déjà vous dire que le thème principal du séminaire sera celui du livre. Dans celui-ci, j’examine comment une crise, en l’occurrence la pandémie actuelle, accélère les processus de civilisation déjà en cours. On parle ici notamment d’éléments comme la durabilité, la digitalisation, l'urbanisation, la mondialisation ou l'individualisation qui accélèrent les processus de civilisation latents."

 

Le livre ‘Gap the Mind’ traite de la résilience et d’autotransformation dans ‘l'intervirum’. Et distingue dix à douze processus de civilisation ou mégatendances.


Évidemment, ce n’est pas un hasard si ‘Gap the mind’ adresse un clin d'œil au célèbre ‘Mind the gap’ proféré par une voix automatique lorsque vous prenez le Métro de Londres. Il y a un espace entre le quai et la rame de métro proprement dite, que vous devez franchir prudemment. Vous effectuez presque littéralement un petit saut."

 

"Les crises saisissent les gens par la peau du cou. Elles ont tendance à accélérer les processus de civilisation qui, normalement, progressent très lentement. Je distingue entre dix et douze de ces processus et les développe. Je classe ces processus sous différentes rubriques. Pour n'en citer que quelques-unes: individualisation, identité fluide, (ré)urbanisation, durabilité, sécurité, connectivité, etc."

 

"Chaque fois, je regarde l'homme en tant qu'être et je constate qu'il existe différents types. J'ai repris un vieux cours de l'université et j'essaie de tout expliquer en utilisant une courbe de Gauss. Une telle courbe ressemble à une onde, dont le point le plus élevé se trouve exactement au centre. Dans la partie centrale, on trouve la plus grande partie de la population, avec des extrêmes des deux côtés. Un exemple: des études montrent que l'homme belge mesure aujourd'hui 1,80 mètre en moyenne. Cet homme de 1,80 mètre se trouvera alors au point le plus haut de la courbe. Ceux qui mesurent 1,70 mètre ou moins seront représentés de plus en plus à gauche sur la courbe et ceux qui mesurent 1,90 mètre ou plus seront représentés de plus en plus à droite."

 

"Une telle courbe permet d’illustrer ce qui s'est passé pendant la pandémie. On remarque alors qu'environ un sixième de la population sur le côté gauche de la courbe correspond à la classe des ‘extravertis’ et le même nombre du côté droit à celle des ‘introvertis’. Le grand dénominateur commun au milieu, un peu moins de 70%, représente ce que l’on appelle les ‘ambivertis’. Concrètement, les extravertis sont ceux qui veulent revenir le plus vite possible à la situation d'avant, tandis que les introvertis voient précisément les choses de façon inverse. Pour eux, c’est la prudence qui prévaut. Le plus grand dénominateur commun aspire quant à lui à un mélange des deux. Les ambivertis prennent ce qui a marché et laissent tomber le reste."

 

 

 

 

Peut-on relier cela à des exemples dans le monde des architectes, des architectes d'intérieur, des designers, etc.?


"Assurément! Ce qui est particulièrement intéressant, c'est qu’on voit émerger une sorte de minimalisme et que cela prendra encore du temps car nous sommes encore loin d'être en eaux calmes. Cela signifie que nous réfléchissons beaucoup plus qu'avant à la manière dont nous nous comportons ou devrions nous comporter et que nous avons retenu plusieurs leçons. Par exemple, nous ne devons pas nous demander si nous allons vers la nouvelle normalité ou l'ancienne normalité familière, mais plutôt qui va vers quoi. Vous remarquerez alors que le plus grand dénominateur commun, à savoir les ambivertis, se dirige de plus en plus vers le minimalisme. Bref, vers le contemplatif et des choses plus calmes."

 

"Cela se voit notamment en architecture des entreprises. Les nouveaux clubs Lynk & Co d'Amsterdam et d'Anvers, qui répondent aux besoins de la ‘génération Y’, en sont un bon exemple. Il est frappant de constater à quel point la couleur est moins présente par rapport à il y a à peine cinq ans. Quand je vois comment le groupe Accor misait sur la même génération en 2014 avec beaucoup de couleurs, tout est devenu beaucoup plus gris et sobre, et c’est certainement lié à la pandémie. Mais, en même temps, il ne faut pas oublier l'évolution de cette même génération. Le millénial sans enfant de l’époque a maintenant des enfants qui gambadent dans la maison et cela aussi a un impact."

 

Vous consacrez un chapitre spécifique à la résilience et à la résonance. Qu'est-ce que vous entendez par là?


"Cela me paraît logique: dans ces circonstances, il faut faire preuve de résilience. En même temps, la résonance est également importante. Cela signifie que vous entrez notamment en dialogue avec la nature, l’homme, la culture, l'art, etc. La résonance est une expérience émotionnelle authentique, pure et non-filtrée. La façon dont les gens vont aujourd'hui observer massivement les aurores boréales en constitue un bon exemple. Il s'agit d'un phénomène naturel unique qui ne peut être capturé dans aucun tableau chronologique, à l’inverse d’un feu d'artifice programmé à 20h15 sur une digue de mer. Nombre de gens vont photographier ces aurores boréales, mais vous ne parviendrez jamais à transmettre la même résonance à vos followers sur Instagram. Vous manquerez ainsi l'expérience de la résonance pure et individuelle."

 

Si vous deviez résumer votre livre, comment le feriez-vous?


"En fait, il y a moyen de faire très court. Nous avons vécu l'expérience irréelle d'une société confinée. Cela laisse des traces profondes et douloureuses, mais permet en même temps à l'esprit humain de s'ouvrir à de nouvelles idées, attitudes, comportements et défis. Les réponses ne se trouvent pas tant dans le ‘nous’ que dans le ‘qui?’.

 

 

Photos: © Herman Konings

Entretien avec le psychologue du changement Herman Konings
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