Il y a une première fois à tout. Dans le cas présent, il s'agit d'une tour en bois quasiment achevée, située à Prilly, en Suisse, une commune d’environ 10 000 habitants dans le canton de Vaud, près de Lausanne. Elle a été bâtie selon une méthode de construction innovante et évolutive, reposant sur un concept énergétique particulier. Cela en fait un exemple d’architecture progressiste qui mérite qu'on s'y intéresse de plus près.
Le bâtiment en bois de 14 étages en cours d'achèvement sur l'aile ouest du centre commercial Malley Lumières à Prilly capte tous les regards. Et ce n'est pas tout : il s'agit du premier building avec une structure en bois de Suisse romande. En effet, à part la base et les murs en béton et les éléments aciers, 80 % de la structure porteuse est en bois. De plus, il y a un élément qui peut induire en erreur au premier abord : l'imposante extension ne repose pas sur les fondations du bâtiment existant. Au contraire, cette prouesse technique est rendue possible par la légèreté de la structure en bois et la construction d'une structure de pont. Les architectes et ingénieurs de Malley Phare sont parvenus à combiner les matériaux pour en tirer le meilleur parti. Mais le bâtiment doit aussi donner le meilleur de lui-même.
Les éléments photovoltaïques transforment la façade en véritable centrale électrique.
“Avant d'entamer la conception architecturale, nous avons évalué précisément le groupe cible de ce nouveau quartier à Malley”, explique Florence Chacornac-Mages, Communications Director chez CCHE. “L'architecture est moderne, innovante, urbaine et intelligente et s'adresse principalement aux jeunes citadins intéressés par des habitations plus petites, mais avec des volumes de vie spacieux et connectés. Ce public ne veut pas d'espaces superflus, mais des pièces supplémentaires. Nous les appelons des pièces « jokers », dont le but est d'accueillir des amis ou de la famille ou de faire du télétravail occasionnellement. Les jeunes citadins privilégient une stratégie de mobilité douce, que le quartier peut leur offrir grâce aux trains, aux bus et bientôt aux tramways.”
Le bâtiment répond à ces attentes avec 96 appartements locatifs, dont neuf studios, 12 lofts, 29 appartements deux chambres, 33 appartements trois chambres et trois appartements quatre chambres. Il y a également huit pièces joker et six espaces de coworking, ainsi que 11 buanderies communes. Sur le toit du bâtiment de 60 mètres de haut, il y a un bar avec une vue imprenable sur le lac Léman.
Pour éviter au bâtiment un aspect trop monolithique, il y a plusieurs interruptions dans le rythme de la façade.
Outre son cachet moderne et élément, l’immeuble est également doté d’une façade pensée pour l’avenir. Le bâtiment est rehaussé de modules photovoltaïques au niveau de la toiture et des façades, créant sa propre centrale électrique. L'objectif est de produire 250 000 kW par an. Pour créer une enveloppe aussi vivante que possible pour le bâtiment, l’équipe a mis au point un modèle de façade ingénieux composé de fentes, d'incisions et de loggias. Les panneaux photovoltaïques tapissant les façade de Malley Phare participent en outre à son cachet distinctif. Ils sont répartis de manière extrêmement bien pensée : plus nombreux et plus rapprochés sur la façade sud, moins nombreux et plus dispersés sur les autres façades moins ensoleillées. Cette disposition plus clairsemée garantit aussi plus de transparence. Enfin, la façade est accentuée par un couloir central allant du nord au sud. Ce couloir relie les appartements et crée des pièces trois fois plus hautes aux deux extrémités.
Le concept architectural répond aux besoins sociaux actuels, notamment dans le domaine des espaces de coworking.
L'un des principaux avantages de la construction en bois est la possibilité d'utiliser des éléments en grande partie préfabriqués. Ici, les éléments, qui forment une trame de 7,7 mètres, sont livrés sur le chantier par camion et peuvent être montés immédiatement. Au total, la construction se compose de 3 000 m² de panneaux de pin, stabilisés par 800 tonnes de structures en acier. Trois poutres à treillis sur trois niveaux triangulaires, représentant neuf étages, ont été montées consécutivement sur le mur porteur ouest de la tour et déplacées à l'aide de quatre vérins hydrauliques. Le poids de la structure à déplacer varie entre 100 et 350 tonnes pour une portée de 46 mètres. Chaque déplacement doit être effectué avec précaution et prend une demi-journée, voire une journée entière. Pour apporter davantage de variété à la façade et rompre le rythme de la structure, la tour se compose au final de trois blocs de cinq, quatre et cinq étages avec trois types d'appartements différents, chaque étage comptant entre sept et dix appartements.
Baignées de lumière et protégées du soleil : les loggias aménagées à l’avant remplissent parfaitement leur rôle.
Des loggias ont été aménagées autour de tous les appartements, à l’exceptions des studios, afin d’éviter un ensoleillement excessif mais aussi pour des raisons acoustiques. Ces structures ajoutent 10 à 15 m² d’espace de vie aux appartements, et servent également de régulateurs de chaleur. Pour contrer la lumière incidente du soir et du matin, les fenêtres avant sont équipées de lamelles Louvre. Les travaux préparatoires ont débuté au printemps 2022 et la réception est prévue fin 2025.
Envie d’admirer de vos propres yeux ce bijou architectural ? Passez le voir avant ou après votre visite à ARCHITECT@WORK à Lausanne (20 et 21 novembre 2024).
Cet article est une traduction retravaillée par Jan Hoffman d’un article de Barbara Jahn
Toutes les photos © CCHE